mercredi 1 février 2012

Zine Story (partie 1)


Dans le n° 14 de Mad Movies sorti en 1976, Jean-Pierre Putters avait écrit un très bon article sur l'histoire des fanzines. Avec l'aimable autorisation de Mad Movies il m'a semblait intéressant de partager ici ce texte qui raconte la genèse des fanzines francophones.

Le sujet étant assez important je vous le propose tel quel mais en plusieurs parties (9).
Voici la première:


"Phénomène pour les initiés, quantité négligeable pour la presse professionnelle, inconnue du grand public, la presse parallèle, ou le fanzinat, charrie quoi qu'il en soit, un bon millier de titres, dont une vingtaine seulement connaissent un certain succès. Notre intention n'est pas ici d'en faire l'historique, ni de prétendre les passer tous en revue. Le fanzinat rayonne d'ailleurs dans une telle quantité de directions, que nous aurions tôt fait de nous disperser. Notre but ne vise qu'à cerner une partie bien spécifique de cette production, celle que nous connaissons le mieux, celle qui parle de ce que nous aimons: le cinéma fantastique.

Il y a déjà bien longtemps qu'il nous tenait à coeur de faire le bilan de ces parutions dont près d'un titre sur trois reste inconnu à la majorité des lecteurs. Dans les coins les plus reculés de notre "Kolossale kollection", des chercheurs viennent de mettre à jour une somme de documents accablants, datant de la période anté-offset: aussi des numéros de CYCLOPE, la collection complète de cette arlésienne de JOURNAL DE JONATHAN HARKER, les premiers numéros de VAMP (qui connaît?), les ECRAN FANTASTIQUE première série, formule ronéo, etc. En remontant vers les couches les plus inaccessibles, nous découvrons encore les MERCURY et son complément MERCURY-BIS, ainsi que bien d'autres trésors, maintenant bien oubliés. 

A la base de tous ces fanzines, nous trouvons un complexe de MIDI MINUIT FANTASTIQUE plus ou moins évident. Notons par exemple, L'ECRAN FANTASTIQUE qui n'hésitait pas à lui reprendre certains titres de rubriques: "Previews", Horrorscope", etc...
Bien souvent, malheureusement, le fanzine sort d"une manière tout à fait précaire et, ceci ajouté aux difficultés de toucher un public, de s'instituer une fréquence de parution ou d'équilibrer son budget, fait que sa situation se montre souvent critique dès le deuxième ou le troisième numéro. Plus encore, le fanzinat connaît surtout sa difficulté majeure en s'assumant assez mal en tant que nouvelle presse; celle que les plus délirants n'hésitent pas à appeler "free press". Si ce vocable peut parfaitement s'appliquer à certains zines de SF littéraire, de bandes dessinées, ou encore de poésies, nous sommes bien obligés de reconnaître (et ce n'est pas seulement un avis personnel) qu'il irait très mal à notre production fanzinale de cinéma fantastique. Plutôt que de s'inventer sa propre écriture et par le simple fait de se référer continuellement à l'archétype initial, de reprendre sans cesse un flambeau imaginaire, un étendard sanglant où flottent pour l'éternité des tartes à la crème de "genre méprisé à défendre", "incoercible cartésianisme français", "cinéma maudit", cette production tourne un peu en circuit fermé et reste en perpétuel retrait de la critique cinématographique officielle. Le fanzinat ne reconnaît bien souvent son cinéma qu'à travers une gênante politique des auteurs où le plus prolifique se voit souvent le plus reconnu. Notons aussi le choix du moindre risque qui consiste à encenser invariablement le chef-d'oeuvre, et à enfoncer de même le navet.
C'est en réaction à cette règle des plus ringardes, que certains critiques prirent des positions parfois quasiment suicidaires pour célébrer le véritable cinéma-bis. Voir Alain Petit dans son MASQUE DE LA MEDUSE, M. Heurtault dans PEEPING TOM, et même, au niveau supérieur, J. Pierre Bouyxou dans STAR SYSTEM, ou toute l'équipe de CINEMA-BIS, dans ses premiers numéros, qui effectuait le travail type du fanzine, avec les moyens d'une revue.

Autre inconvénient, le fanéditeur, devant la difficulté de s’identifier en tant que critique, se camoufle parfois derrière un élément technique qui débouche sur la maniaquerie. C’est souvent une fiche technique d’une demi-page et un texte de cinq lignes qui a pu décourager l’éventuel lecteur pas très spécialiste. Or, face à son intérêt – même dévorant -, il ne trouve qu’un esprit de chapelle ne visant à rallier qu’une poignée de fans, fiers d’être "dans le coup"."

Partie 2.

Merci à Mad Movies: http://www.mad-movies.com/ (anciens numéros sur http://shop.mad-movies.com/)

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